« Je voulais un bok choy mauve ! »

David Whiteside en est à sa troisième année de production avec les Jardins de la Marmotte, une ferme de 2 acres située à Bromont en Estrie. Il y a plusieurs défis pour la nouvelle génération d’agriculteurs : « Il y a de la demande pour les légumes locaux dans la région. Mais l’accès à la terre et au logement est particulièrement difficile. Il y a une pénurie de main d'œuvre et l’hébergement des employés est quasiment impossible.»

Le projet de bok choy mauve est une idée de David. « J’ai été inspiré par le travail de Gwynne Basen de la Ferme Abbondanza, qui fait des efforts pour garder les variétés rares et ancestrales en culture, puis de Dan Brisebois de la Ferme Tourne-sol.  Dan a apporté beaucoup de couleur et de diversité dans son Tatsoi Arc-en-Ciel et ses crucifères feuillus. J’aime bien les verdures asiatiques aussi. Ça pousse bien par temps chaud comme par temps froid, et c’est goûteux ! » 

Selon David, la production de semences de ce type de légume-feuille est facile à intégrer à sa production maraîchère. Ce sont des plantes annuelles dont le cycle de reproduction est assez court pour notre climat. On peut produire des semences rapidement et en grande quantité. Enfin, les semences ne sont pas endommagées par les intempéries parce qu’elles sont protégées par des siliques.

La première étape du projet a été d’identifier les parents du croisement. « Shanghai Green est pas mal la seule variété de bok choy vert à pollinisation libre facilement disponible sur le marché. Elle a la forme typique de bok choy que je cherchais pour ce projet ». Il a identifié la moutarde douce de type komatsuna Lady Murasaki, vendu par Fedco, pour son intense coloration mauve. « On a même informé Fedco qu’on souhaite faire de l’hybridation avec cette variété et ils nous ont encouragés. C’est motivant. » 

« Le mentorat de Dan a été précieux. C’est là où j’ai compris qu’il était avantageux de faire deux années de croisements entre les variétés parent pour augmenter les chances que de nouvelles combinaisons génétiques se fassent. J’ai aussi appris que le fait de conserver les lots de semences séparément permet de gagner du temps. Comme ça je suis sûr de planter un nombre égal de semences issues des plants-mère Shanghai Green et Lady Murasaki pour créer la génération F2, ce qui maximise le croisement génétique. » 

La première année, le croisement a été fait sur deux sites : aux Jardins de la Marmotte et au jardin de démonstration de Sème l’avenir à Senneville, dans l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal. « Mon lot avait été mélangé par accident lors de la récolte, donc avoir du stock de Senneville nous a permis de ne pas perdre cette première année. » 

Puisque les brassica rapa produisent des semences en abondance, David en a assez pour produire des bok choy hybridisés pour la vente auprès de sa clientèle aussi. « C’est une façon facile pour moi de rentabiliser un projet de création variétale sur ma ferme. En plus, cela me permet de partager l’histoire du projet et ses différentes étapes de réalisation avec mes clients. C'est une belle manière d’éduquer le consommateur sur comment une nouvelle variété de légume se crée. Le coordinateur régional de Sème l’avenir a même trouvé un restaurant dans mon ancien quartier à Montréal où j’ai pu vendre certains de mes crucifères feuillus, dont les bok choy colorés.»

Photos d'un spécimen F1 (gauche), de la diversité génétique qui s’exprime dans cette première génération (centre) et des plantes juste avant la récolte pour la semence, avec les  siliques qui commencent à sécher (droite). Source : Jardins de la Marmotte.